L'argument
L’aube entre deux
Chaque poème est le véhicule humble et puissant d’une réceptivité aiguë au monde. Ceux de Cécile A. Holdban qui composent ce premier recueil, témoignent, tous sens en éveil, d’une acuité enchantée, ouverte et attentive aux révélations de ce qui l’entoure, capable d’embrasser l’éternité dans l’instant fugace et d’extraire l’infini dans le fragment imperceptible :
Un instant d’Éternel me suffit
un morceau d’Infini m’étourdit,
fourmi que je suis
je me repais
des miettes
d’un pique-nique céleste
Poésie intimiste autant que tellurique, l’écriture de Cécile A Holdban adopte, au gré de ritournelles aux accents verlainiens ou bien de ruptures de rythme épousant blessures, fêlures et cassures, une forme d’apparente simplicité enfantine, où l’émerveillement du regard le partage à une sorte d’angoisse ontologique :
Le monde est à l’envers
les étoiles disparues
il n’y a que les ombres
qui nous gagnent un peu plus
Mais si la nuit est le décor de nombre des poèmes qui composent ce recueil, elle n’a rien d’effrayant ni d’obscur
– sauf à lui donner l’acception mystique que lui attribue saint Jean de la Croix. Et si elle recèle sa part de mystère, c’est encore une fois au sens religieux du terme qu’il faut l’entendre. En effet, volontiers contemplative et mélancolique, la voix poétique de Cécile A oldban célèbre une oraison panthéiste, à la fois sobre et généreuse :
Du silence mes abeilles
font un miel secret
Cette “nuit qui [l]’étreint” est la matrice des étoiles et des rêves, comme dans un tableau de Chagall. Car si elle est éminemment synesthésique, la poésie de Cécile A Holdban est avant tout visuelle, habitée de lumière et de couleurs, composant un “mandala paré de brillants” ou bien gravant “une lettre vive / au corps de plume portant superbe / un soleil rouge mon rêve ardent”.
Pudique, toute en retenue, l’écriture de Cécile A. Holdban déborde pourtant d’une sensibilité maternelle offrant à son enfant “l’ordonnance des étoiles / le souffle des quatre vents” et d’une sensualité toute féminine éprouvant “sous
[s]a peau / la vague de tes reins”.
Ainsi, ce
ciel passager abrite, dans ses éclaircies comme dans ses orages, la vérité d’une femme inscrite dans le cycle naturel des êtres et des choses. D’une saison l’autre. D’une nuit l’autre. L’aube entre deux.
Thierry Sziget
L'extrait
Respiro
gracieuse à l'oubli
son doigt délié
touche les absences
son sourire est bleu
sous l'eau
Données techniques
Cécile A Holdban
Ciel passager
Poésie
Collection Ouvre-Boîtes
90 pages
Parution en Mars 2012
20
euros
ISBN : 978-2-919483-08-2