L'argument
(ou la mémoire réouverte)
Ces poèmes sont nés de deux rencontres - la même peut-être.
La première, il y a des années avec la poésie de Paul Celan - choc esthétique et profondément humain. Je me souviens combien cette phrase tentant de définir la poésie de Celan me troublait : écrire dans la langue des bourreaux. Je pensais : qui, quoi, hors la poésie parvient à faire cela ?
La deuxième rencontre s’est produite à Wiesbaden où j’étais accueillie à la Villa Clémentine pour une résidence poétique autour de la majestueuse figure d’Hildegarde de Bingen. Tel était mon projet lorsque ALCA aquitaine a retenu ma proposition.
C’était sans compter, lors d’une première visite de la ville, ma rencontre avec les pierres d’achoppements. Stolperstein en allemand. J’en ignorais alors l’existence. J’ai d’abord cru à une décoration au sol - des petits carrés dorés. J’ai pensé à Klimt. Puis j’ai lu : le nom, la date de l’arrestation, le lieu de déportation. Auschwitz pour la plupart.
Le choc fut si grand - une lettre/recueil de poèmes à Paul Celan s’est imposée à moi.
Il y a longtemps que je voulais lui écrire. Me manquait peut-être jusque là le lieu, le sol, la langue. La mémoire (ré)ouverte. Me manquait un premier soir au monde.
(Je n’ai jamais eu la force de visiter le petit musée juif de Wiesbaden. J’ai toujours eu peur d’y croiser, sur une photo, mon visage).
L'extrait
ton pays de hêtres
bat
de toute sa vigueur
dans ma chambre
fleurissent
les pousses nocturnes
il y a
dans leurs contours
blancs
enneigés
ta silhouette entière
Données techniques
Laurence Lépine
Un premier soir au monde
Lettre à Paul Celan
Poésie
Collection Ouvre-boîtes
72 pages
Parution le 27 Février 2025
15 euros
ISBN 978-2-491991-29-6
ISSN 2112-8820